La CCC 2012...
Courmayeur-Champex-Chamonix
Au programme, qui sera amené à changer, 100 KM et 5950 m de D+.

Après deux échecs à l'UTMB dus à un syndrome rotulien trop douloureux (2007 abandon au bout de 78 KM à Courmayeur, 2009 abandon au bout de 123 KM à Champex), et un tirage au sort défavorable sur la CCC en 2011 (rendu obligatoire par le trop grand nombre de demandes), je me suis dis que 170 KM était peut être trop pour mes vieux genoux et que ma malchance de 2011 serait absente en 2012...

L'ésprit et l'ambiance du WE de l'UTMB sont tellement uniques que je me devais, pour me faire plaisir, de me présenter sur un des parcours proposé par l'organisation.

Le choix s'est 
naturellement porté sur la CCC. Ma non sélection en 2011 me plaçait prioritaire sur le tirage au sort et c'est la partie de l'UTMB que je n'avais pas terminé. Il y a toujours, caché au fond de moi, le projet de m'y représenter une troisième fois.

Mes saisons 2010 et 2011 m'ont donné très largement le nombre de points nécessaires pour me qualifier pour le tirage au sort et je reçois le précieux sésame mi-janvier.

RDV est pris pour le vendredi 31 août à 9h00 au centre de Courmayeur en Italie.
J'ai eu la chance de trouver un logement à Chamonix pour deux nuits, et vu les milliers de personnes que drainent cet événement, ça tient du miracle.
La veille est donc dédiée aux derniers contrôles et préparatifs du matériels.

Tout est vérifié 10 fois au moins. Pas d'improvisation possible sur une telle épreuve et le poids étant l’ennemi de tout coureur de trail, j'ajuste au mieux mon équipement obligatoire demandé par l'organisation, mes petits "trucs" pour plus de conforts et ma nourriture pour le programme en vue.
Le contenu de mon sac (sauf les 2 boîtes)

Le poids idéal. Sans la boisson

Les bus de l'organisation nous font traverser le tunnel du Mt-Blanc et la pluie qui tombe depuis 2 jours sur Chamonix est absente côté italien. mais le ciel ne demande que ça.
Les participants de la TDS partis la veille ont connu plus de 50% d'abandon à cause des conditions météo en montagne. Cela inquiète et existe à la fois.
Peur d’abandonner et envie d'en découdre avec les éléments.

La pluie et le vent sont des alliés pour moi, mes années de Chasseurs Alpins m'ont donné une rusticité qui me sert bien et j'aime être confronté aux mauvais temps... Dans la limite de ma sécurité bien sur.

Tout propre, avant.

Peu de temps avant le départ, un SMS de l'organisation nous informe qu'il neige trop fort en altitude et que deux difficultés sont retirées du parcours par sécurité, la Tête de la Tronche, peu après le départ, et la Tête aux vents, peu avant l'arrivée.
Le premier culmine à 2600 m en Italie et le second à 2130 côté français.
Cela ramène le tracé à 90 KM et 4600 m de D+. Bien suffisant pour se faire plaisir.
Le départ avec la musique de Vangelis... Frissons garanties

Nous sommes un peu moins de 2000 au départ.
H -10 min. Départ en 3 vagues pour éviter les bouchons

Une fois le départ donné, comme à chaque fois, je suis parcouru de frissons. La nature du défi, les sacrifices que cela a demandé, la quinzaine d'amis à qui j'ai promis d'envoyer des SMS et qui comptent sur moi, mon envie de finir enfin une épreuve durant ce WE hors norme dans le monde du trail, la préparation aux petits oignons qui devrait être payante et les encouragements des centaines de spectateurs font un effet que je n'oublierai jamais.

Mais le menu est costaud et je ne souhaite pas être pris dans les bouchons, alors GO !!
La montée vers le refuge Bertone se passe bien et j'y arrive en 58 minutes en 411 position. Je n'aurais pas d'info sur mon classement avant Vallorcine à 15 KM de l'arrivée
Arrivée sur le refuge Bertone

Nous aurions du passer à la Tête de la Tronche avant le refuge, c'est la, le premier changement pour nous.
Vue sur Courmayeur depuis le refuge Bertone

Commence alors la longue remontée du Val Ferret pour rejoindre Arnuva et le début de la première grosse difficulté. Le ciel s'obscurcit et les premières gouttes apparaissent après même pas deux heures de courses, elles ne nous lâcheront plus jusqu'à l'arrivée.
Remontée du Val Ferret

Le passage au refuge Bonatti se fait après deux heures pile poil accompagné de neige fondue. Je suis maintenant classé 383.
Neige fondue, brouillard, mère nature nous colle un handicap

Arrivée à Arnuva, soit un peu plus de 20 km. Cela fait 2h46 que je coure et j'ai les premiers échos des conditions dans la première difficulté, le Grand Col Ferret à 2540 m. Vent en tempête et neige sont au programme avec une température bien négative.
Je décide de prendre mon temps pour manger une soupe chaude, contrôler que ma nourriture est accessible et me débarrasser de mes premiers gels consommés.
Il me reste 770 m de D+ pour atteindre le col et je repars 420 ième.

Depuis Arnuva, les premières neige

Motivé le Phyl !!

La pluie redouble au fur et à mesure que nous prenons de l'altitude et les visages se crispent mais les plaisanteries sont toujours là.
Par contre il y a bien moins de spectateurs et on se demande bien pourquoi !!
Passage au refuge Elena

La neige est là à 2000 m... Fin août

La montée se passe super bien, j'ai les jambes alors que les premières défaillances se font sentir chez certains. Le froid, la pluie froide sur les muscles, le mental qui commence à faire des yoyos devant ce qui nous attend la haut... De bonnes raisons de voir les premiers abandons.

Le sommet approche

Le passage est effectivement dans les conditions que l'on nous avait annoncées et je dois avouer que j'y prends du plaisir. Ce qui me rassure c'est que je ne suis pas le seul. 
Nous avons un peu moins de 30 KM dans les jambes, il en reste donc plus de 60. 
Je passe en 4h00, j'ai repris 50 places dans la montée, les jambes et le mental sont au beau fixe.
Je passe, mais les bénévoles eux... Restent ! Bravo et merci !

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Là nous sommes partis pour 10 KM de descente jusqu'à la Fouly et 10 de plus avant d'attaquer la seconde difficulté de la journée, la montée vers Champex qui précède celle de .... Bovine. LA légende de ce parcours et surtout de l'UTMB.

Descente vers la Fouly

J'arrive à la Fouly en pleine forme mais avec une certaine appréhension. En 2009 j'avais abandonné peu après, à Champex.
Différence notable, j'avais 70 KM de plus dans les jambes.

Je quitte la Fouly au bout de 5h10 de course et j'ai grignoté 46 places, je suis 325 ième.
Au fond la montée vers Champex

Je fais une bonne pause pâtes, soupe et complément en eau à Champex mais sans m'assoir. Je cours depuis 7h36 avec un peu plus de 50 KM de fait et je suis en pleine forme.
Le fameux lac de Champex que je n'ai pas vue en 2007 et 2009

Commence alors cette fameuse montée, mais ça reste un sacré morceau même sur la CCC.
Bovine !!!
Elle porte bien son nom. C'est une montée bien technique avec des passages qui demandent toute ma lucidité et une bonne forme. Je n'ose pas imaginer ceux qui vont franchir ça le lendemain sur l'UTMB dans leur seconde nuit sans dormir (finalement ils ne viendront pas jusque là, la météo aillant chambouler le tracé). 
J'attrape un train et avec un bon rythme nous dévorons cette avant dernière difficulté du jour.
Sous la pluie, un bonheur

Nous sortons au sommet dans la neige. Certains sont assis dans la ferme qui sert de ravito. Visages décomposés, tremblements incontrôlés, l'abandon est déjà décidé ou va s'imposer.
De mon côté, tout va bien, le passage vers la descente sur Trient se fera dans la neige.
Je pars au bout de 9h18 de course de et je suis 326 ième.

Dernier coup d’œil sur Martigny

La descente vers Trient, d'abord débutée sous la neige, se poursuit sous un véritable déluge. Les chemins sont glissants et avec plus de 60 KM dans les jambes, plus la nuit, la vigilance n'est pas à son meilleure. Mais ça sent la fin.
Passage à Trient au bout de 10h15 et je ne m'arrête pas du tout. Les jambes sont là, le mental toujours à bloc alors je ne veux pas tenter le diable en passant un peu de temps sous les tentes chauffées du ravito. Je repars en ayant gagné près de 80 places depuis Bovine et je suis maintenant dans les 250 premiers, mais je ne suis toujours pas au courant.

J'attaque la montée vers Catogne 700 m plus haut, totalement seul.
Les virages s’enchaînent et la pluie se fait de plus en plus froide. Je connais mon premier et unique coup de moins bien.
Je décide de ne pas me mettre dans le rouge, je paie peut être le fait de ne pas avoir pris le temps de bien manger à Trient. Sans m'arrêter, je m'alimente et je me fais dépasser par une longue file d'une trentaine de coureurs. Mais l'arrivée est encore loin et il serait idiot d'aller à la casse en n'écoutant pas les signaux d'alerte.

Je reprends un rythme assuré mais sans tenter le diable, le temps que mon alimentation fasse son effet.
Dommage que je n'ai pas pu prendre de photos avec mon Iphone à cause de la nuit vers le sommet, parce que l'ambiance valait le coup !
Nous rejoignons rapidement la neige et là ça ne rigole plus. Le vent s'invite, les bourrasques de neige nous fouettent jusqu'à nous transformer en bonhommes de neige.

Je trouve un camarade de galère pour finir la montée et nous sommes tous les deux heureux comme des gosses de vivre ça. Le moral et la forme sont réveillés par l'air glacial !
Le froid saisi les doigts et les pieds mais la descente et la pluie qui nous réchaufferont ne sont pas loin.

Le plus hallucinant est qu'il y a des bénévoles au sommet pour prendre nos passages ! Les pauvres ont le sourire et nous encouragent en plus. Rencontre d'Inuits sur la CCC !!!

Descente vers Vallorcine 750 m plus bas au pas de charge. Je laisse mon binôme de Catogne et je mène une descente sans trop voir à cause de la neige mais totalement seul.
De nouveau sous la pluie, je rejoins Vallorcine et les 15 derniers KM.

En quittant le ravito de Vallorcine. Où est la sortie ?

C'est ici que j'aurais pour la première fois une information sur mon classement. Je suis 274 ième !

Grosse surprise. Alors que mon objectif était de terminer dans le premier quart, soit dans les 500 premiers, je peux espérer faire beaucoup mieux si... Je me bouge les fesses.

Je connais par cœur la fin du parcours surtout que nous ne montons pas à la Tête aux Vents vers la Flégère.
J'adopte le même rythme que sur un 15 KM, zappe le ravito de Argentières et je descend du Lavancher comme si j'avais le diable aux trousses.

Chamonix est là, tout proche, toujours sous la pluie.

Je passe l'arrivée au bout de 14h51 en 235 ième position sur 1585 finishers.

Je ne pouvais pas espérer faire aussi bien !!

Sur la ligne d'arrivée

Je récupère enfin cette polaire du Finisher avec les initiales CCC en me disant que je finirais bien par lui gagner une grande sœur avec les initiales UTMB.

Que dire d'autre, à part que c'est ma plus belle course jusqu'à aujourd'hui.
15 heures de pur plaisir avec des souvenirs pleins la tête. Une météo dantesque qui rend le résultat de chacun encore plus fort et une ambiance digne d'une grande fête.

Evidemment, organisation sans failles, parfaite à tout point de vue et des bénévoles exceptionnels ! Merci à eux !!!

Après cet ultra, plus que réussi, je n'arriverais pas à trouver la motivation pour me présenter sur la Saintélyon comme prévu. Mais ce n'est pas grave, en une course, j'ai trouvé tout ce que ce sport pouvait me donner de meilleur...

Mes temps et classements de passage


Parcours initialement prévu

Profil réel en tenant compte des 2 sommets en moins







Météo de Béziers (34)

Météo de Chamonix (74)